900 tonnes de nourriture
L’association zurichoise avait effectivement un besoin urgent de support technique. Essen für Alle dispose aujourd’hui d’une base de près de 1’000 bénévoles. À chacune de ses interventions le samedi, il faut jusqu’à 250 bénévoles pour assurer le bon déroulement des opérations et nourrir environ 1’400 personnes et leurs familles. Chaque semaine, l’organisation évite le gaspillage de plus de 18 tonnes de nourriture. Les quelque 5’500 personnes dans le besoin qui ont été enregistrées jusqu’à présent ont reçu environ 62’000 portions de nourriture depuis l’introduction du nouveau logiciel, ce qui représente l’équivalent de 900 tonnes de denrées alimentaires. Ces chiffres s’apparentent à ceux d’une entreprise de taille moyenne qui approvision nerait une petite commune.
Les noms et les données des béné voles et des bénéficiaires doivent être saisis individuellement de manière à pouvoir organiser la répartition des équipes de bénévoles et enregistrer de manière fiable le nombre de repas servis. Auparavant, le système était particulièrement vulnérable aux erreurs et aux abus: on assistait souvent à des enregistrements multiples et à des pertes des cartes de retrait imprimées sur papier. «Nous avons donc programmé un logiciel pour effectuer ces tâches spécifiques sur la plateforme de développement SAP», explique Keywan Nadjmabadi. «Nous l’avons mis en ligne en septembre 2022.»
Grâce à ce nouveau système, les personnes dans le besoin n’ont plus besoin de faire la queue pendant aussi longtemps. Jusqu’à 120 nouveaux bénéficiaires sont enregistrés tous les samedis. Le logiciel OCR scanne les cartes, ce qui évite les doubles enregistrements. Au lieu de cartes en papier, nous disposons désormais de cartes en plastique dotées d’un code QR, moyennant une taxe unique de cinq francs. Les personnes qui ne peuvent pas faire la queue trop longtemps reçoivent une aide prioritaire.
La technologie aide à mieux planifier la distribution des repas. Chaque repas distribué est enregistré et le nombre de repas peut être comparé à la quantité de nourriture encore disponible. Ainsi, la décision de donner, par exemple, quatre ou six oranges par personne incombe au personnel. «La sécurité du système a été renforcée», déclare Keywan, «et nous avons également amélioré la sécurité des données, car les données personnelles sont désormais sécurisées dans un cloud géré par SAP.»
Tout d’abord sceptique, le fondateur d’Essen für Alle, Amine Diare Conde, a fini par admettre: «C’est efficace, ça marche et nous avons eu peu de problèmes.» Après un an, il tire de cette collaboration un bilan très satisfaisant. Outre Zurich, Essen für Alle est déjà active dans les cantons des Grisons et de Schwyz. D’autres cantons suivront à l’avenir. L’un des grands avantages du logiciel SAP est son évolutivité: il peut facilement être étendu à d’autres sites. «Help the world run better!»
Keywan explique que le bénévolat à la distribution des repas aide à relativiser le regard sur les besoins. Depuis la guerre en Ukraine, la perception des migrants et des migrantes a également changé: «Il y a des personnes de toutes les couches sociales, en partie très formées et bien habillées. On est loin de l’image de personnes sans ressources qui viennent de traverser la Méditerranée.»
Fuir la Guinée
Amine Diare Conde est arrivé lui aussi par la Méditerranée, il y a neuf ans. Il a raconté son histoire à maintes re prises: sa fuite de la Guinée, en Afrique de l’Ouest, son arrivée en Suisse en passant par l’Espagne et la France. Amine a connu la faim. «Je fais moimême partie de celles et ceux qui devaient se contenter de 8,50 francs par jour. Or, un café et un croissant coûtent environ 8 francs. Avec 8,50 francs, il fallait que je me débrouille pour le petitdéjeuner, le déjeuner et le dîner, les billets de train et le téléphone portable. Sans l’aide des églises ou d’autres institutions, je n’aurais jamais pu survivre.»