Antoinette Hunziker-Ebneter sur la durabilité: L'avenir des placements financiers

«La durabilité est la nouvelle norme en matière d'investissement»

Antoinette Hunziker-Ebneter, une pionnière de l'investissement durable, parle de l'importance croissante de la durabilité dans le secteur financier et de l'influence que les investisseurs peuvent exercer sur les entreprises.

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Depuis la création de Forma Futura il y a près de deux décennies, Antoinette Hunziker-Ebneter a contribué de manière déterminante à établir l'investissement durable dans le monde de la finance. Aujourd'hui, elle considère la durabilité non seulement comme une tendance, mais aussi comme un élément indispensable des stratégies financières modernes. Dans cette interview, elle explique ce que signifie réellement la durabilité dans le secteur financier, comment reconnaître le greenwashing et pourquoi les investisseurs critiques jouent un rôle clé dans la transformation du secteur.

Madame Hunziker-Ebneter, comment évaluez-vous l'état actuel de la durabilité dans le secteur financier?

Lorsque Forma Futura a été fondée il y a environ 18 ans, la durabilité était encore une niche dans le secteur financier. Depuis, les placements durables sont devenus la "nouvelle norme" dans la gestion de fortune. Certains parlent d'une tendance, mais je suis convaincu que la durabilité est la nouvelle norme dans le domaine des placements - ou du moins qu'elle le sera bientôt. L'offre de placements durables ne cesse de s'élargir et les clients peuvent désormais choisir le degré de durabilité qu'ils souhaitent pour leurs placements.

Antoinette Hunziker-Ebneter est depuis 2006 partenaire fondatrice de Forma Futura Invest AG, une société de gestion de fortune indépendante spécialisée dans les placements financièrement solides et durables pour les clients privés et institutionnels. En outre, elle dirige depuis 2015 le conseil d'administration de la Banque cantonale bernoise SA (BEKB). Avec plus de 30 ans d'expérience dans la gestion des finances et des risques, notamment en tant que présidente de la Bourse suisse et membre de la direction du groupe de la Banque Julius Baer & Co, elle est considérée comme une pionnière dans le secteur. Elle s'engage en outre en tant que cofondatrice de la waterkiosk foundation, qui soutient des projets visant à fournir de l'eau potable dans les pays émergents.

Existe-t-il des directives internationales auxquelles les clients peuvent se référer?

Il n'existe actuellement pas encore de consensus mondial sur ce qui peut être qualifié de durable ou non. C'est pourquoi la mise en œuvre de la durabilité varie considérablement d'un prestataire à l'autre. A cela s'ajoute le fait que certains prestataires de services financiers considèrent encore la durabilité exclusivement sous l'angle du risque. Cet aspect prend en compte les effets des risques liés à la durabilité sur la rentabilité des entreprises, mais pas les conséquences des activités des entreprises sur la société et la nature.

Croyez-vous que les placements financiers durables peuvent effectivement avoir un impact positif sur la société et la nature?

Oui, car l'argent fait bouger le monde. La demande croissante de placements financiers durables de la part d'investisseurs privés et institutionnels sera un facteur d'influence et un moteur d'action important pour les conseils d'administration et les CEO afin d'accélérer la transformation de leurs entreprises vers plus de durabilité dans leurs propres opérations et dans la chaîne d'approvisionnement. Outre les clients, les actionnaires et les autorités de régulation, les investisseurs ont également un rôle à jouer dans la promotion de la durabilité.

Comment les investisseurs peuvent-ils s'assurer que les produits d'investissement durable sont réellement durables et pas seulement présentés comme tels?

Si les investisseurs veulent savoir si leur argent est réellement investi de manière durable, ils doivent examiner de manière critique leur prestataire de services financiers et les produits proposés. Cela implique d'exiger sans compromis toutes les informations dont ils ont besoin pour prendre une décision de placement et d'en tirer les conséquences si leurs exigences et leurs attentes ne sont pas satisfaites. Pour la transformation de la durabilité, nous avons besoin d'investisseurs critiques qui veulent savoir dans quelle mesure et avec quelle précision les établissements financiers assument leur responsabilité et dans quelle mesure ils interprètent la durabilité de manière ouverte ou étroite et, finalement, la mettent en œuvre dans leurs activités commerciales. Nos clients nous remettent sans cesse en question de manière critique dans le cadre d'un échange ouvert - cela soutient notre développement.

Quelles sont les principales différences entre les placements financiers durables et les investissements traditionnels?

Une différence essentielle réside dans l'intention : alors que les investissements traditionnels ont pour objectif de maximiser le rendement financier, les placements financiers durables visent au moins à réduire les effets négatifs des investissements sur la société et l'environnement, voire à avoir un impact positif pour les approches les plus ambitieuses. Selon la combinaison d'approches durables, cette intention est également visible dans la mise en œuvre effective : par exemple, un processus de sélection rigoureux et global, des stratégies de dialogue cohérentes et le vote sont des exemples de la manière dont les placements financiers durables se distinguent des investissements traditionnels.

Quelles sont les chances de rendement des placements durables par rapport aux placements traditionnels?

Plusieurs études concluent que les placements durables sont aussi rentables que les placements traditionnels sur une longue période. Notre expérience chez Forma Futura montre que même avec un processus de placement durable et une procédure de sélection rigoureux, il est possible d'obtenir des rendements compétitifs. Sur le long terme, les entreprises qui s'occupent depuis longtemps et sérieusement de durabilité sont très bien placées pour l'avenir. Elles ont posé les jalons nécessaires à la transformation, y compris dans le domaine de la transition énergétique. Le cas d'investissement pour ces entreprises reste donc convaincant, en particulier dans une perspective à long terme.

Quelles mesures les entreprises peuvent-elles prendre pour éviter le greenwashing?

Différentes réglementations - notamment au niveau de l'UE - tentent d'empêcher le greenwashing par le biais de règlements de transparence et d'obligations de déclaration. La transparence est très importante, mais elle ne suffit pas. La communication sur la durabilité doit également être compréhensible. Pour éviter le greenwashing, les entreprises devraient s'engager à communiquer de manière ouverte, transparente, honnête et compréhensible sur leurs pratiques commerciales, leurs produits et leur impact sur la société et l'environnement.