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Avec 127 kilogrammes par an, la Suisse présente la plus importante consommation de plastique par habitant en Europe. Photo: Shutterstock

Production et consommation Contenu du partenaire: ETH

L’impact de nos habitudes de consommation

Quel est notre levier le plus puissant contre le changement climatique? Un groupe de recherche de l’ETH de Zurich développe des modèles et des méthodes qui indiquent le chemin vers un avenir plus respectueux des ressources.

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L’impact de nos habitudes de consommation

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À une époque où la pollution et la raréfaction des ressources se retrouvent au coeur de l’actualité, l’économie circulaire a le vent en poupe. Les spécialistes sont unanimes: pour passer d’une économie linéaire à une économie circulaire, les consommateurs et consommatrices ont un rôle à jouer, au même titre que les acteurs et actrices politiques et économiques. En prenant des décisions d’achat éclairées, nous pouvons réduire notre empreinte écologique, mais aussi inciter les entreprises à changer leur façon de penser.

Déduire des stratégies

Pour prendre des décisions éclairées, encore faut-il disposer d’informations fiables. Stefanie Hellweg, professeure en conception des systèmes écologiques à l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ), et son équipe de l’Institut d’ingénierie environnementale élaborent des instruments et des méthodes qui permettent d’évaluer avec précision les produits, les technologies et les modèles de consommation. Pour cela, ils utilisent des modèles qui décrivent l’impact environnemental des émissions de gaz à effet de serre liées à la consommation quotidienne.

Mais de quoi s’agit-il, exactement? «En termes simples, nous montrons et mesurons l’impact du comportement humain sur l’environnement», explique la Prof. Hellweg. En dépit de la complexité du réel, les acteurs et actrices économiques et politiques, mais aussi les citoyens et citoyennes, peuvent utiliser ces résultats pour mettre au point des stratégies ou prendre des mesures concrètes qui contribuent à minimiser l’impact écologique.

Présenter les options

Il ne s’agit pas de savoir si la transition vers une consommation durable des ressources et une production verte est nécessaire, mais comment y parvenir. Et à cet effet, mieux vaut s’atteler à cette tâche dès aujourd’hui plutôt qu’attendre demain. Les travaux de l’ETHZ portent principalement sur les matières premières, leur production et leur utilisation, ainsi que sur l’économie circulaire, notamment à travers une analyse des avantages et des effets des cycles de matériaux.

Il s’agit d’analyser les alternatives et de présenter des options respectueuses de l’environnement. On peut toutefois douter que cela suffise à faire évoluer les mentalités dans des cercles plus larges. Il faut mettre en place d’autres systèmes d’incitation, que ce soit sous la forme de dispositions légales ou de subventions pour les nouvelles technologies. «L’abandon des habitudes de production et de consommation entraînera des changements radicaux pour chaque individu», explique Stefanie Hellweg (voir l’entretien). «Mais en prenant conscience de l’impact écologique de nos actions, nous pourrons mieux jouer notre rôle dans les défis qui nous attendent.»

Tenir compte du contexte

Les scientifiques utilisent des sources de données, comme l’enquête fédérale sur le budget des ménages, et les associent à l’apprentissage automatique pour identifier des modèles de consommation. Ces derniers sont ensuite évalués en fonction de leur impact sur l’environnement, de manière à distinguer les comportements respectueux des comportements nuisibles pour l’environnement.

Dans la pratique, les outils développés par la Prof. Hellweg et ses collègues sont utilisés pour quantifier l’impact environnemental des profils de consommation et des produits d’usage courant. Pour ces derniers, cela peut prendre la forme de labels qui serviront de référence aux commerçants et commerçantes, ainsi qu’aux consommateurs et consommatrices. Un produit de consommation à fort impact environnemental est étiqueté et quantifié sur la base de faits et pourra, dans le meilleur des cas, être écarté en faveur d’un choix alternatif moins impactant sur le plan écologique.

Les logements et les infrastructures bâties jouent aussi un rôle très important, notamment sur le long terme. Les bâtiments contribuent de manière significative aux émissions climatiques, non seulement pendant leur fonctionnement, à travers le chauffage fossile, mais aussi par la production de matériaux de construction et les émissions qui en résultent.

L’équipe de l’ETHZ étudie les moyens de réduire l’impact des bâtiments et des infrastructures sur le climat. Une fois encore, il s’agit d’examiner la situation dans son ensemble, explique la Prof. Hellweg. La construction en bois permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux autres matériaux. Mais s’il s’agit de bois importé, son utilisation peut avoir un impact négatif sur la biodiversité en fonction de l’origine des essences et du mode d’exploitation forestière. Il ne faut jamais négliger les liens de cause à effet, selon la Prof. Hellweg, «que ce soit à grande ou à petite échelle».


«On ne peut pas tout avoir»

L’instauration d’une économie circulaire passe par un changement nécessaire des mentalités chez les consommateurs et consommatrices, selon la Prof. Stefanie Hellweg de l’ETH de Zurich.

Prof. Hellweg, quel est le rang actuel de la Suisse en matière de recyclage?

Stefanie Hellweg: Nous nous en tirons pas trop mal, en comparaison avec d’autres pays. Notre taux de recyclage est très élevé pour de nombreux matériaux et nous ne cessons de progresser. Mais il y a urgence, car en tant que pays riche, nous consommons six fois plus de ressources et générons dix fois plus d’impacts climatiques que les pays à faible revenu.

On entend souvent dire que le tri des déchets au niveau individuel ne sert pas à grand-chose, si nos pays voisins, les entreprises ou la Chine ne suivent pas. Qu’en est-il vraiment?

C’est absolument faux. Nous avons calculé que le système actuel de recyclage permet d’économiser plus de 500 000 tonnes de CO2 par an à l’échelle du pays. Mais le tri des déchets ne sauvera pas à lui seul le climat. Les études d’analyse des cycles de vie montrent que le logement, la mobilité et l’alimentation sont les domaines de consommation les plus importants en termes d’émissions de gaz à effet de serre. La consommation des ménages contribue également de manière significative au changement climatique, à la perte de biodiversité et à d’autres impacts environnementaux.

Où voyez-vous le plus grand potentiel de progrès pour le recyclage?

Dans l’économie circulaire, il s’agit avant tout d’éviter de produire des déchets, que ce soit en renonçant à consommer, en partageant davantage de produits ou en prolongeant la durée de vie des biens de consommation. Je vois un grand potentiel dans l’achat de produits alimentaires en fonction des besoins et dans la prévention des pertes de denrées alimentaires. Le recyclage conventionnel présente aussi une belle marge de progression.

Auriez-vous d’autres exemples?

Le cas du plastique est édifiant. Le taux moyen de recyclage de l’ensemble des déchets plastiques s’élève aujourd’hui à un peu plus de 9%. Si nous trions et collectons tous les produits plastiques recyclables avec la même rigueur que nous le faisons déjà pour le PET, nous pourrions augmenter ce taux à 23%. Il faut cependant relever un grand défi: les matériaux plastiques sont constitués d’un nombre invraisemblable de composants. Une partie d’entre eux est potentiellement nocive pour l’être humain et l’environnement. Par ailleurs, le nombre d’additifs utilisés pendant le recyclage diminue souvent la qualité du produit recyclé ou le rend tout simplement impropre à une utilisation sûre. Une séparation plus rigoureuse des plastiques, une utilisation moindre de produits chimiques, une conception plus uniforme des matériaux, des produits et des chaînes d’approvisionnement contribueraient à améliorer la qualité et le potentiel de recyclage du plastique.

«Dans une économie circulaire, il faut réduire les déchets.»

En principe, cela concerne surtout les acteurs et actrices industriels, économiques et politiques. Mais pour nous, consommateurs et consommatrices, où réside le plus grand potentiel d’amélioration?

De manière générale, dans la volonté de réduire les déchets. En Suisse, de nombreux biens ne sont utilisés que rarement, voire jamais, par les consommateurs et consommatrices. Par ailleurs, les études montrent que celles et ceux qui souhaitent réduire leur empreinte écologique en renonçant à certains produits ou en choisissant d’autres modes de consommation subissent parfois un effet de rebond.

De quoi s’agit-il?

Ce qui est économisé ici est dépensé plus loin. En achetant un vêtement usagé dans un magasin d’occasion, on fait une bonne action et on économise de l’argent… que l’on dépense allègrement dans une nouvelle paire de jeans! Il faut absolument changer les mentalités. Dans la perspective d’une économie circulaire durable, on ne peut pas tout avoir.

Photo: ETH Zürich

Photo: ETH Zürich

Stefanie Hellweg Professeure en conception des systèmes écologiques à l’ETH de Zurich

Agir de manière durable

Comment soutenir l’économie circulaire?

C’est très simple. Voici douze conseils pratiques pour soutenir l’économie circulaire dans votre vie quotidienne:

  • N’achetez que des produits dont vous avez vraiment besoin (sur le long terme) et qui sont importants pour vous.
  • Planifiez vos achats afin de réduire les déchets alimentaires ou autres (p. ex. les textiles ou les produits électroniques).
  • Lorsque vous achetez des aliments ou d’autres produits, choisissez la bonne taille d’emballage afin d’éviter les restes.
  • Achetez des produits d’occasion (p. ex. les textiles). „
  • Pour les produits non périssables, choisissez ceux qui utilisent peu ou pas d’emballage. „
  • Optez pour des emballages réutilisables et rechargeables plutôt que des emballages jetables (et employez les emballages réutilisables plusieurs fois). „
  • Réparez les appareils défectueux au lieu de les jeter. Rendez-vous dans les repair cafés ou consultez les instructions en ligne. En revanche, les appareils très anciens qui consomment beaucoup d’énergie doivent être remplacés. „
  • Transformez les vieux objets, (p. ex. les bocaux en rangements). „
  • Prenez des récipients réutilisables pour la consommation à l’extérieur (p. ex. pour la restauration à l'emporter).
  • Ayez recours aux offres de partage et aux bourses d’échange dans votre région. „
  • Utilisez les points de recyclage, même en déplacement (p. ex. les points de collecte du PET ou de l’aluminium). „
  • Triez soigneusement vos déchets pour un recyclage plus efficace.

Déclaration : Ce contenu a été réalisé par la rédaction de Sustainable Switzerland pour le compte de l'ETH Zurich.

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