Résultat: 85% des répondants ont choisi l’option 2 ou 3. Seuls 15% savent que dans les pays hors du top 40, les revenus ont en vérité triplé, passant de 3464 dollars en 1970 à 10 688 dollars de nos jours. Le résultat est encore pire quand on interroge les gens au sujet de l’évolution de l’extrême pauvreté au cours des vingt dernières années: 89% répondent qu’elle est restée stable ou a augmenté. Alors qu’elle a baissé de façon réjouissante, passant de près de 30% de la population mondiale en 1999 à moins de 10%. Pour la première fois de l’histoire de l’humanité, la grande pauvreté a de bonnes chances de devenir marginale. Et nous refusons d’y croire.
Des biais cognitifs
On pourrait multiplier les exemples: alimentation, espérance de vie, alphabétisation et bien d’autres. Le monde va mieux que ce que l’on imagine. Angus Deaton, qui a reçu le Prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel, parle même d’une «grande évasion» de l’humanité. A l’échelle mondiale, la situation continue de s’améliorer. Nous nous focalisons sur des événements marquants car négatifs, et peinons à voir les dynamiques de fond, silencieuses car heureuses.
Si la Suisse ne fait pas partie du panel des pays interrogés par la fondation Gapminder, il n’y a pas de raison rationnelle de croire que les biais qui s’observent ailleurs dans le monde n’ont pas leur équivalent dans nos têtes. En Suisse comme partout, le pessimisme fait recette. Un élément fascinait Hans Rosling: même en répondant au hasard, l’être humain arriverait à un résultat plus proche de la réalité que celui qu’il obtient en répondant à son questionnaire. Autrement dit, et ce, peu importe notre niveau de formation, nos croyances sur l’état du monde nous rendent aveugles.
Les défis à surmonter restent bien évidemment nombreux. Il est d’autant plus important d’éviter de s’embarrasser de fausses vérités qui nous empêchent d’avancer. Car, comme le dit Johan Norberg, un autre optimiste réaliste, la principale explication de la nostalgie du «bon vieux temps», c’est le manque de mémoire. Alors, soyez comme Hans Rosling, raisonnablement optimiste. Le monde vous déprime? Lisez son livre Factfulness. Penser clairement ça s’apprend!