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L’expérience «VPDrought» du WSL dans le bois de Finges vise à manipuler l’humidité de l’air pour étudier l’effet de la sécheresse.

L’expérience «VPDrought» du WSL dans le bois de Finges vise à manipuler l’humidité de l’air pour étudier l’effet de la sécheresse. Photo: Kellenberger Photography/ETH-Rat

Climat et énergie

Des brumisateurs dans la forêt de Finges pour étudier la résistance des arbres à la sécheresse

Dans le cadre d’une expérience menée par le WSL, une installation vaporise de l’eau dans la pinède de Finges, près de Loeche en Valais. Il s’agit de tester l’effet de variations de la sécheresse de l’air et du sol sur la santé des arbres.

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Des brumisateurs dans la forêt de Finges pour étudier la résistance des arbres à la sécheresse

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Le bois de Finges, qui descend à flanc de montagne jusque dans la vallée du Rhône près de Loèche (VS), est exceptionnel en tout point. Il s’agit non seulement de la plus grande pinède des Alpes, mais aussi, depuis 2003, d’un laboratoire à ciel ouvert pour étudier la réponse des arbres face au changement climatique.

«Dans ce site de basse altitude, à environ 600 mètres, les pins sylvestres connaissent une très forte mortalité depuis deux décennies, suite à des sécheresses importantes, explique Charlotte Grossiord, professeure en écologie végétale à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Etudier cette région, l’une des plus touchées par la sécheresse en Suisse, nous permet de mieux comprendre quelles sont les conditions précises qui entraînent le dépérissement des arbres.»

Des pins en déclin dans la forêt de Finges après un épisode de sécheresse.

Des pins en déclin dans la forêt de Finges après un épisode de sécheresse. Photo: Marcus Schaub, WSL

La chercheuse est codirectrice du projet inédit lancé cette année dans le bois de Finges par l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL. Intitulée «VPDrought», l’expérience vise pour la première fois à manipuler la sécheresse non seulement du sol mais aussi de l’air dans une forêt naturelle mature. L’analyse de très nombreux paramètres permettra de décrypter les rôles de ces deux facteurs sur la santé des pins, à l’échelle de la cellule et de l’écosystème.

«La réponse des arbres à un manque d’eau dans le sol a déjà été bien étudiée. L’idée est de mieux comprendre maintenant l’impact de la sécheresse atmosphérique, précise Charlotte Grossiord. La sécheresse du sol est de plus en plus souvent combinée à une sécheresse dans l’air avec l’augmentation des températures. Il s’agit d’un nouveau type de sécheresse. Et il existe peu d’études en milieu naturel qui manipulent les deux, séparément ou de manière combinée.»

Effet de l’air «assoiffé»

Cette nouvelle catégorie de sécheresse est associée à un mécanisme appelé VPB (vapor pressure deficit en anglais) ou demande évaporative, qui décrit à quel point l’air a «soif». «C’est comme si on comparait un désert et une forêt tropicale. Si on met un verre d’eau dans un désert, où l’air est très sec, il va se vider plus vite que s’il est dans une forêt tropicale, très humide.» Le VPD est déterminant pour la quantité d’eau que les arbres évaporent par leur feuillage. Plus la température de l’air est élevée, plus le VPD augmente aussi et donc prélève de l’eau de la végétation. Dans l’expérience VPDrought, les scientifiques miment les variations de demande évaporative en manipulant la sécheresse de l’air ressentie par les plantes.

Concrètement, le site d’étude dans le bois de Finges est ponctué d’échafaudages. A leur sommet, des buses émettent une vapeur de très fines gouttelettes d’eau dans l’environnement de certains arbres, au niveau de la canopée. Les parcelles étudiées ont été réparties en plusieurs catégories. Des arbres ne subissent aucune modification de leur climat, d’autres une seule – les sols sont soit irrigués, soit protégés en partie des précipitations, ou alors les plantes sont soumises à un air plus humide – et les derniers groupes combinent manipulations du sol et de l’air.

Les brumisateurs – qui correspondent à une aspersion de 200 litres par heure sur le terrain d’étude – permettent de diminuer de 20 à 30% la demande évaporative sur les parcelles concernées. «Comme on ne peut pas retirer de l’eau de l’air, nous faisons l’inverse, nous en ajoutons à certains endroits pour obtenir un gradient avec les groupes contrôles, explique Charlotte Grossiord. Puis nous pourrons extrapoler les effets observés à des conditions de sécheresse plus importantes. On s’attend à ce qu’avec la combinaison air sec et sol sec, le dépérissement soit accéléré, c’est-à-dire que le stress de l’air sec soit aussi important que le stress de la sécheresse du sol.»

Des arbres bardés de capteurs

Pour mesurer l’impact de ces conditions climatiques sur les arbres, ces derniers sont bardés de capteurs. Des boîtiers sont collés à leurs troncs d’où sortent des câbles et des tuyaux. Parmi ces instruments, des dendromètres suivent la croissance des arbres en mesurant au micromètre près les variations de la circonférence du tronc. «Un arbre grandit au fil des saisons. Mais il y a aussi des variations plus fines. Chaque jour, le tronc rétrécit à cause de la perte d’eau due à l’évaporation par les feuilles, puis il revient normalement au niveau basal la nuit en récupérant de l’eau par les racines, explique Roman Zweifel, écophysiologiste au WSL. Nous nous demandons si un arbre est capable d’accumuler les rétrécissements de la journée, c’est-à-dire les déficits en eau, sans retour basal, sur une période prolongée.»

Roman Zweifel montre les mesures du flux d’eau dans l’arbre et de la croissance journalière du tronc mesurées par des capteurs à l’intérieur de l’arbre.

Roman Zweifel montre les mesures du flux d’eau dans l’arbre et de la croissance journalière du tronc mesurées par des capteurs à l’intérieur de l’arbre. Photo: Aurélie Coulon

Les scientifiques se posent aussi une autre question: d’où provient l’eau qui circule dans le tronc en fonction des conditions climatiques? Pour y répondre, Arthur Gessler, chef du groupe de recherche Ecologie des écosystèmes au WSL, mesure, grâce à des spectromètres, un marqueur de l’eau (H2O): la proportion en isotopes lourds et légers des atomes d’oxygène (O) et d’hydrogène (H). «Il existe un gradient isotopique dans le sol: l’eau de surface est plus riche en isotopes lourds, car les plus légers partent par évaporation, alors qu’à 2 mètres de profondeur, l’eau est enrichie en isotopes légers.»

Un pin du bois de Finges est équipé d’instruments de mesure des isotopes de l’oxygène et de l’hydrogène dans l’eau du tronc, dans le cadre de l’expérience «VPDrought» du WSL.

Un pin du bois de Finges est équipé d’instruments de mesure des isotopes de l’oxygène et de l’hydrogène dans l’eau du tronc, dans le cadre de l’expérience «VPDrought» du WSL. Photo: Aurélie Coulon

Au total, ce sont près de 120 paramètres qui sont analysés sur les différentes parcelles, ainsi que la quantité de photosynthèse – et donc celle de CO2 capturé dans l’air par les plantes –, la tolérance aux fortes températures, le point limite de mortalité des arbres ou encore la quantité de CO2 émise par le sol. Autant d’indicateurs de la santé des arbres et de l’effet des sécheresses de l’air et du sol.

«Cette étude est importante pour pouvoir à la fois prédire le type de gestion à prévoir dans les forêts en Suisse, mais aussi plus largement le rôle des forêts comme puits de carbone, affirme Charlotte Grossiord. Les modèles de prédiction climatique actuels ne prennent pas en compte l’impact de la sécheresse de l’air donc ils sont partiellement faux. Grâce à nos observations, nous pourrons les améliorer.»

Les premières données sont collectées depuis avril, mais il est encore trop tôt pour les scientifiques pour dégager une tendance. «Pour l’instant, l’effet du dessèchement du sol est plus marqué que celui de l’air à cause des précipitations importantes des derniers mois, constate la chercheuse. Il faudra attendre l’année prochaine pour avoir un plus grand contraste d’humidité entre les parcelles et observer l’effet des brumisateurs.» Le projet durera jusqu’en 2028.

Aurélie Coulon, «Le Temps» (28.08.2024)

Sustainable Switzerland publie ici des contenus de Le Temps.

Cet article traite des SDG suivants

Les Objectifs de développement durable (ODD) sont 17 objectifs mondiaux de développement durable convenus par les États membres de l'ONU dans l'Agenda 2030. Ils couvrent des thèmes tels que la réduction de la pauvreté, la sécurité alimentaire, la santé, l'éducation, l'égalité des sexes, l'eau propre, les énergies renouvelables, la croissance économique durable, les infrastructures, la protection du climat et la protection des océans et de la biodiversité.

13 - Lutte contre le changement climatique
15 - Vie terrestre

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