Renoncer est difficile, même en Suisse
Malgré le niveau de conscience écologique de notre pays, les résolutions portant sur les actions quotidiennes ne sont pas toujours suivies d’effet, notamment les restrictions pour la protection de l’environnement. Il est frappant de constater que les personnes interrogées ont du mal à renoncer à la mobilité, surtout quotidienne. Un comportement respectueux du climat pourrait être soutenu par des incitations financières ou de nouvelles technologies durables. «Mais si on leur présente la facture, les gens détournent sans hésiter les yeux de leurs idéaux, même en Suisse, même s’ils savent que le changement climatique est en cours», explique Michael Hermann. Cette attitude a été constatée aussi bien chez les générations plus âgées que chez les plus jeunes.
Dans ces conditions, mettre en œuvre des mesures climatiques qui pèsent sur le budget des ménages relève d’un travail de titan. Le système politique suisse, qui accorde à ses citoyens et citoyennes de nombreux droits de participation et de décision, joue à ce titre un rôle essentiel. Par ailleurs, notons que les prescriptions et les interdictions légales sont très moyennement appréciées au sein de la Confédération, comme l’a confirmé la présente enquête.
«Ce qu’il faut, c’est davantage de pédagogie. Nous devons nous assurer que les gens comprennent les aspects positifs de ces changements», affirme Christiane Varga, spécialiste en tendances et en prospective.
Sur le long terme et en dépit de sa difficulté, cette approche s’avère également moins coûteuse que l’imposition d’interdictions.
«Le changement fait peur à beaucoup de personnes, et pas seulement depuis le réchauffement climatique», explique Mme Varga. Il faut donc convaincre le public que l’avenir recèle de nombreuses possibilités. «Et qu’il est agréable de participer à leur élaboration.»
Cette peur de l’avenir est également très perceptible dans le domaine de la numérisation et des nouvelles technologies. L’enquête de BKW démontre toutefois que ces dernières sont très positives pour la préservation des habitats: les technologies du solaire et de l’hydrogène, les solutions d’économie d’énergie intelligentes ou les nouvelles applications visant à améliorer l’efficacité énergétique suscitent l’espoir d’une transition aussi indolore que possible sur le plan économique. A contrario, la rapidité de l’évolution numérique accroît le sentiment d’insécurité. «Il faut combiner l’infrastructure numérique et la vie analogique avec finesse et pertinence», explique Mme Varga. Cela se fera-t-il sans heurts? La question reste entièrement ouverte, surtout dans une société aussi hétérogène, qui agit parfois de manière contradictoire. L’éclairage public intelligent est un exemple simple d’une application qui utilise les nouvelles technologies pour améliorer l’efficacité énergétique. L’éclairage n’est activé la nuit que lorsque c’est nécessaire pour la circulation des véhicules et des passants. On peut ainsi économiser de l’énergie sans renoncer au confort ni au sentiment de sécurité, un résultat bien accueilli par la population. Parallèlement, on obtient un autre effet secondaire réjouissant: la pollution lumineuse diminue.
«Aujourd’hui, il est presque impossible d’admirer les étoiles la nuit», regrette Mme Varga. Ceci a entraîné une certaine aliénation de la nature à de nombreux endroits.
«Les solutions intelligentes comme les éclairages publics intelligents sont comparativement simples et logiques, mais il faut d’abord y penser», explique la chercheuse en prospective et en habitat.
Une plateforme d’innovation et de dialogue constructif
C’est la double vocation de l’initiative «Espaces de vie 2025» de BKW. Grâce à ses nombreux ateliers, la plateforme propose des espaces de liberté pour la collaboration et la construction d’un dialogue fécond entre l’économie, la science, la société et la politique. Ce cadre commun permet de poser des questions concrètes sur les espaces de vie de demain et leur aménagement sous différentes formes. Les échanges entre les groupes d’intérêts internes et externes doivent servir de base à l’élaboration de solutions innovantes et de nouveaux projets. En principe, les premiers résultats seront présentés d’ici 2025.
Mais il s’agit avant tout d’exploiter l’élan positif en faveur de la nature et de l’environnement qui, selon l’étude, est déjà présent et ancré dans notre pays, et d’inciter les gens à agir. «En réalité, les conditions sont bonnes: les gens participent, sont intéressés et veulent changer la situation», explique Mme Varga. Les plateformes d’impact telles que l’initiative «Espaces de vie 2025» devraient donc permettre de réaliser de nombreuses actions positives. Au final, «il ne faut pas compter seulement sur le fait que les actions suivent les idéaux – même si la conscience des défis à venir est déjà largement ancrée en Suisse», a déclaré le chef de Sotomo, Michael Hermann.